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Des précisions concernant l’obligation d’assurer l’accès du public aux décisions administratives affectant l’environnement

Araceli Turmo , 17 janvier 2013

L’affaire Križan e.a. c./ Slovenská inšpekcia životného prostredia (C-416/10) a permis à la Cour de justice d’apporter de nouvelles indications sur l’interprétation de la directive 96/61, à la lumière de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement. Le litige en cause au principal trouve son origine dans une décision autorisant la construction et l’exploitation d’une décharge de déchets en Slovaquie. Les requérants contestent la légalité de cette décision, du fait que l’inspection de l’environnement ne disposait pas de la décision d’urbanisme autorisant l’implantation d’une décharge sur le site lorsqu’elle a ouvert la procédure intégrée d’autorisation, et, l’ayant obtenue, ne l’a pas publiée. La Cour exclut l’applicabilité au litige en cause au principal de la directive 85/337, dont le délai de transposition n’était pas écoulé lors de l’introduction formelle de la demande d’autorisation du projet.

S’appuyant sur la convention d’Aarhus, la Cour de justice estime que le public concerné par une telle procédure d’autorisation doit, en principe, avoir accès à tous les renseignements pertinents. La décision d’urbanisme constitue, en l’espèce, l’une des mesures sur la base desquelles est prise la décision finale, et comprend des informations telles que les incidences du projet sur l’environnement et les conditions imposées à l’exploitant afin de les limiter : le public concerné doit donc, en principe, y avoir accès avant l’adoption d’une décision d’autorisation. L’existence d’un intérêt à protéger des informations commerciales ou industrielles ne saurait justifier le refus de publier ce document.

En revanche, dans le cas où le public n’y aurait pas eu accès avant l’adoption d’une décision, la directive ne s’oppose pas à ce que ce refus injustifié soit régularisé au cours d’une procédure administrative de deuxième instance, dès lors que le droit national prévoit une solution équivalente pour les vices de procédure de nature interne, et que toutes les options restent encore possibles, le public pouvant encore exercer une réelle influence sur l’issue du processus décisionnel. Il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier le respect de ces conditions, découlant des principes d’équivalence et d’effectivité.

Afin de garantir l’effectivité du droit d’exercer un recours contre les actes relevant de la directive 96/61, les membres du public doivent pouvoir obtenir des mesures provisoires permettant leur suspension temporaire. Par ailleurs, la Cour de justice rappelle que le droit de propriété n’est pas une prérogative absolue, et qu’un objectif d’intérêt général, tel que la protection de l’environnement, est susceptible d’en justifier une restriction. La directive 96/61 opérant un équilibre entre ces deux objectifs, une décision annulant une autorisation ne saurait constituer, en tant que telle, une atteinte injustifiée au droit de propriété de l’entreprise concernée.

Le renvoi posait également une question relative aux rapports entre systèmes juridictionnels dans l’Union. Le litige en cause au principal a en effet déjà fait l’objet d’une décision de la Cour constitutionnelle, qui lie la juridiction auteure du renvoi, juridiction de dernier ressort au sens de l’article 267 al. 3 TFUE. La Cour de justice, évoquant notamment ses arrêts Elchinov (C-173/09) et Melki (C-188/10 et C-189/10), rappelle qu’aucune règle de procédure nationale ne saurait remettre en cause la faculté (ni, comme en l’espèce, le devoir) qu’a tout juge d’un État membre de la saisir d’un renvoi préjudiciel, ni le fait qu’il sera lié par l’arrêt rendu par la Cour. Ces solutions s’appliquent donc également lorsque le juge de renvoi est tenu de suivre la position d’une cour constitutionnelle, qu’il devra écarter en cas de non-conformité avec le droit de l’Union.


Reproduction autorisée avec l’indication: Turmo Araceli, "Des précisions concernant l’obligation d’assurer l’accès du public aux décisions administratives affectant l’environnement", www.ceje.ch, actualité du 17 janvier 2013.