Dans le but de favoriser le marché unique en droit de la propriété intellectuelle, une harmonisation plus poussée du droit matériel et procédural est mise en place par le nouveau règlement 2015/2424 et la nouvelle directive 2015/2436, adoptés le 16 décembre 2015. La réforme du droit des marques s’inscrit dans la perspective et la volonté de faciliter aux entreprises l’enregistrement des marques, ainsi que d’accroître la compétitivité en rendant le système plus prévisible et juridiquement sûr.
Le règlement 2015/2424, qui entrera en vigueur le 23 mars 2016, modifie les règles existantes sur la marque communautaire, leur application, ainsi que sur l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (OHMI). En effet, un des premiers changements apportés est le remplacement du nom « marque communautaire » par « marque de l’Union européenne » et la substitution de l’OHMI par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), qui sera le seul office compétent pour traiter les demandes d’enregistrement. Le règlement comprend de nombreuses modifications substantielles, mais aussi des nouveautés telles que des règles relatives à la gestion des licences. Il dresse une liste de signes qui peuvent constituer une marque de l’UE, précise les droits conférés au titulaire de la marque, ainsi que la portée et la limitation des effets de la marque. Finalement, par soucis de transparence et de sécurité juridique, le fonctionnement de l’Office a été mis à jour avec, notamment, une volonté de lui octroyer le rôle de médiateur en cas de litige fondé sur le règlement. Ce dernier comporte en outre, des dispositions qui facilitent la lutte contre la fraude et la corruption au sein de l’Union, en particulier en prévoyant l’adhésion de l’Office à l’accord interinstitutionnel relatif aux enquêtes internes effectuées par l’Office européen de lutte antifraude (OLAF).
Les objectifs visés par le règlement 2015/2424 sont parallèlement poursuivis dans le cadre de la nouvelle directive 2015/2436 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques. A long terme, cet instrument législatif, qui comporte pas moins de 57 articles, vise la promotion de l’innovation, ainsi que la croissance économique. Dans l’objectif de faciliter aux entreprises l’accès à l’enregistrement des marques au niveau de l’Union européenne, une protection identique dans les systèmes juridiques de tous les Etats de l’Union doit être garantie, ainsi qu’une liste indicative de signes qui peuvent être acceptés en tant que marque doit être constituée. Il est important de soulever que suite aux développements technologiques, la représentation graphique de la marque n’est plus exigée, en revanche une représentation claire et précise, qui permet de délimiter l’objet à protéger, est toujours nécessaire. En outre, il est spécifié que pour garantir une bonne administration et sécurité juridique, le signe doit être représenté de manière claire, précise, distincte, facilement accessible, intelligible, durable et objective. C’est aussi la raison pour laquelle tous les motifs de nullité d’une marque doivent être listés, même si certains d’entre eux restent facultatifs, au choix de l’Etat membre de les introduire. L’enregistrement de la marque au niveau national devrait être semblable au système d’enregistrement prévu pour les marques de l’UE et ce, pour des motifs de sécurité et prévisibilité juridique. Par ailleurs, une importance plus accrue a été donnée aux marques renommées, qui désormais devraient jouir d’une protection plus étendue et servir de base pour refuser l’enregistrement d’une nouvelle marque. La nouvelle directive vise à neutraliser les divergences de protection dans les Etats membres, tout en encourageant la mise en place d’une procédure administrative sur le plan national, pour permettre aux demandeurs d’avoir une option parallèle attrayante. Finalement, la directive accentue la nécessité de veiller à ce que les marques enregistrées soient réellement utilisées afin de réduire le nombre d’enregistrements et les conflits y afférents : elle octroie ainsi un délai de cinq ans pour utiliser la marque de manière effective et sérieuse. La directive doit être transposée en janvier 2019, à l’exception de l’article 45, auquel les Etats membres doivent se conformer uniquement le 14 janvier 2023.
Ces changements, parmi d’autres, nous amènent à souligner l’importance du rôle que va jouer le nouveau « paquet marque ». En effet, le domaine des marques est extrêmement internationalisé – un corollaire inévitable de l’implantation des entreprises multinationales et de l’accroissement des échanges transfrontières. La valeur commerciale qu’il représente nécessite une protection et uniformisation au niveau de l’Union européenne afin d’éviter, à chaque opération, un cloisonnement du marché intérieur, des procédures administratives lourdes, une entrave à la libre circulation des produits et à la libre prestation des services. Ainsi, les nouveaux instruments législatifs mis en place font face à ces problématiques. Tout en permettant une coexistence des systèmes nationaux et du système de l’UE, la modernisation législative relative aux marques fait son chemin « vers un marché unique des droits de propriété intellectuelle » au sein de l’Union européenne.
Alicja Zapedowska, «Réforme du système des marques – la clé vers l’innovation et la lutte contre la fraude », Actualité du 16 février 2016, www.ceje.ch