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Contestation des vices de procédure, ‘code frontières Schengen’ et Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne

Ljupcho Grozdanovski , 25 janvier 2013

Dans l’arrêt Zakaria, rendu le 17 janvier 2013 (aff. C-23/12), la Cour de justice a fait preuve d’une grande prudence au sujet des violations alléguées des dispositions de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, résultant non du contenu d’une décision administrative, mais d’un vice de procédure commis lors de l’adoption de celle-ci.

M. Zakaria, dispose d’un document d’identité de réfugié palestinien émis par les autorités libanaises, ainsi que d’une autorisation de résidence permanente en Suède.

Ayant pris un avion à Beyrouth (Liban), à destination de Copenhague (Danemark) via Riga (Lettonie), il a fait l’objet d’un contrôle d’identité effectué par les garde-frontières lettones, qui lui ont finalement autorisé l’entrée sur le territoire de la Lettonie. Considérant que ce contrôle a été fait de manière grossière, provocante et offensante pour la dignité humaine, M. Zakaria a saisi les juridictions administratives lettones d’une demande de réparation du préjudice moral subi. Sa demande a été rejetée, au motif qu’en vertu du droit national, seuls les refus d’entrée sur le territoire de Lettonie peuvent être contestés, la législation lettonne ne prévoyant aucune voie de recours qui permettrait la contestation d’un vice de procédure commis lors de l’adoption d’une décision d’autorisation d’entrée sur le territoire national.

La juridiction administrative d’appel a confirmé la décision de la juridiction inférieure. Le litige a ensuite été porté devant la juridiction administrative suprême, qui a éprouvé des doutes quant à la compatibilité de la législation nationale avec le règlement n° 562/2006, établissant le ‘code frontières Schengen’, et a posé trois questions préjudicielles à la Cour de justice. Elle a d’abord demandé si au sens de l’article 13 dudit règlement, une personne est en droit de contester un refus d’entrée, ainsi que des infractions commises au cours d’une procédure administrative résultant, finalement, en une décision autorisant l’entrée sur le territoire d’un Etat partie de la Convention d’application de l’accord de Schengen. Elle a ensuite demandé si en vertu du règlement n° 562/2006, ainsi que de l’article 47 la Charte des droits fondamentaux, relatif au droit à un recours effectif et à l’accès à un tribunal impartial, les autorités nationales doivent assurer la mise en œuvre d’une voie de recours devant un tribunal, ou le cas échéant, devant un organe présentant les mêmes garanties qu’un tribunal.

La Cour de justice n’a répondu qu’à la première question préjudicielle. Elle a rappelé que l’article 13 du règlement n° 562/2006 ne prévoit l’obligation de mise en œuvre d’une voie de recours qu’en cas de refus d’entrée sur le territoire d’un Etat partie à la Convention d’application de l’accord Schengen. Or, l’entrée sur le territoire letton du requérant au principal a été autorisée. Par conséquent, la Cour a jugé que les éléments de la demande de décision préjudicielle ne permettent pas de déterminer si les faits de l’affaire au principal constituent un cas de mise en œuvre du droit de l’Union européenne au sens de l’article 51 de la Charte des droits fondamentaux.

Les réponses aux deuxième et troisième questions préjudicielles dépendant de la réponse positive à la première question, la Cour de justice a jugé qu’il appartient à la juridiction de renvoi de déterminer  si la situation du requérant au principal relève du droit de l’Union européenne et dans l’affirmative, si les garde-frontières ont pleinement respecté la dignité humaine dans l’exercice de leurs fonctions, conformément à la Charte des droits fondamentaux. Si toutefois, la juridiction de renvoi considère que l’affaire au principal ne relève pas du droit de l’Union européenne, celle-ci devra être examinée à la lumière du droit national en prenant en considération  les dispositions de la CEDH.


Reproduction autorisée avec l’indication: Grozdanovski, Ljupcho, "Contestation des vices de procédure, 'code frontières Schengen' et Charte des droits fondamentaux", www.ceje.ch, actualité du 25 janvier 2013