Le 21 mars 2016, la Commission européenne et le service européen pour l’action extérieure (SEAE) ont publié le rapport résumé de la consultation publique initiée en octobre 2015 sur l’avenir du partenariat entre l’Union européenne (UE) et les pays d’Afrique, des caraïbes et du Pacifique (pays ACP). En effet, cette consultation publique est intervenue dans la perspective des futures relations entre l’Union européenne et les pays ACP au-delà du 29 février 2000, date à laquelle l’accord de Cotonou signé le 23 juin 2000 arrivera à échéance.
Intitulé « Toward a new partnership between the European Union and the African, Caribbean and Pacific countries after 2020 », le rapport dresse le bilan des deux décennies d’application de l’accord, tout en formulant diverses propositions en vue d’améliorer le partenariat. À cet effet, deux principaux aspects de la coopération ont été mis en avant à savoir d’une part, les domaines ou les objets sur lesquels elle porte, et d’autre part, les moyens de mise en œuvre.
Concernant d’abord les domaines couverts par le partenariat, il ressort un bilan mitigé de l’application de l’accord de Cotonou. En effet, même s’il est admis divers apports dudit accord notamment dans les domaines politique, économique et social du partenariat, il n’en reste pas moins que plusieurs insuffisances sont pointées du doigt. Ainsi, dans le domaine du partenariat politique, le mécanisme du dialogue politique prévu à l’article 8 de l’accord de Cotonou est jugé comme étant trop technique, trop formaliste et marqué par une forte influence politique de l’UE. Quant au partenariat économique, il est parfois perçu comme étant trop focalisé sur les aspects commerciaux au grand dam des aspects sociaux.
S’agissant des moyens de mise en œuvre du partenariat, le rapport aborde plusieurs questions liées, entre autres, à la cohérence du cadre géographique de la coopération ainsi qu’aux instruments et mécanismes de la coopération au développement. Sur ces questions, l’efficacité d’un accord unique entre l’UE et tous les pays ACP est loin de faire l’unanimité tandis que celle du fonds européen de développement (FED) et des divers autres mécanismes de coopération au développement est remise en question. Au regard des insuffisances ci-dessus relevées et des débats soulevés en ce qui concerne les moyens de mise en œuvre, diverses propositions ont été formulées, lesquelles permettent de se projeter d’ores et déjà sur les futures lignes du partenariat UE-pays ACP si celles-ci venaient à être prises en compte par les institutions européennes.
Selon les propositions formulées, la future coopération entre l’UE-pays ACP devrait comporter diverses améliorations qui peuvent être réparties en deux principaux axes à savoir d’une part un partenariat mieux équilibré et plus participatif, et d’autre part, un partenariat axé sur le développement humain et social et prenant davantage en compte les préoccupations des pays ACP. Le caractère équilibré et participatif du futur partenariat implique, entre autres, que le mécanisme du dialogue politique intègre, à l’avenir, le niveau régional et soit ouvert à d’autres parties prenantes telles que les organisations de la société civile et les autorités locales. Du point de vue des moyens de mise en œuvre du partenariat, il apparaît nécessaire de prévoir le co-financement des pays ACP qui ont atteint un certain niveau de développement dans la mesure où l’unique financement par les ressources de l’UE serait incompatible avec l’autonomie, la crédibilité et à la légitimité de ces pays. En ce qui concerne le partenariat axé sur le développement humain et social et prenant davantage en compte les préoccupations des pays ACP, le futur accord entre l’UE et ses partenaires devrait intégrer le nouvel agenda 2030 pour le développement durable. Dans le domaine spécifique de la politique de migration, la prise en compte des acquis de l’accord politique et du plan d’action y relatif, adoptés par les partenaires lors du sommet de la Valette tenu en novembre 2015, a notamment été préconisée. Du point de vue des moyens de mise en œuvre du partenariat, le développement de mécanismes tels que les initiatives de jumelages, d’assistance technique et d’échanges d’informations, devrait être encouragé.
À l’inverse de ces deux orientations possibles des relations entre l’UE et les pays ACP, la future configuration géographique du partenariat apparaît plus incertaine tant les propositions divergent à cet égard. Entre les partisans du maintien d’un accord unique entre l’UE et tous les pays ACP et ceux qui préconisent une approche sous-régionale, la question principale qui se pose est celle de l’option la mieux efficace pour atteindre les objectifs communs des partenaires. Il s’agit d’un débat largement ouvert dans la mesure où divers arguments peuvent être égrenés en soutien à l’une comme à l’autre approche. En revanche, il est au moins certain que le partenariat UE-pays ACP, quelle que soit sa future configuration géographique, devra respecter et promouvoir les valeurs fondatrices de l’UE telles que définies à l’article 2 du traité UE. Pour le reste, il n’y a pas de doute que les diverses contributions recueillies dans le cadre de consultation constituent une mine importante d’informations et de propositions qu’il appartiendra à l’Union européenne d’exploiter judicieusement afin de clarifier l’avenir de ses relations avec les pays ACP devenus, au fil des années, un partenaire privilégié.
Martial Zongo, " L'avenir des relations UE-pays ACP: quel partenariat après l'accord de Cotonou?", Actualité du 6 avril 2016, www.ceje.ch