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Critères de recevabilité du recours en annulation en matière d’antidumping

Mateusz Milek , 15 juillet 2024

Le 20 juin 2024, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu un arrêt dans l'affaire C-252/23 P concernant un pourvoi introduit par l'European Association of Non-Integrated Metal Importers & distributors (Euranimi) contre une ordonnance du Tribunal de l'Union européenne. Cette affaire portait sur le règlement d'exécution (UE) 2021/2012 du 17 novembre 2021

par lequel la Commission européenne a instauré des droits antidumping sur les importations de produits plats laminés à froid en aciers inoxydables originaires d'Inde et d'Indonésie. Euranimi, représentant les intérêts des importateurs européens d'acier non intégré, d'acier inoxydable et de produits métalliques, a contesté ce règlement devant le Tribunal de l’Union européenne.

Le 7 février 2023, le Tribunal a rejeté le recours d'Euranimi en estimant que l'association ne remplissait pas les critères de recevabilité requis pour intenter une telle action. En particulier, le Tribunal a jugé qu'Euranimi n'était pas individuellement concernée par le règlement attaqué. Dans son pourvoi devant la CJUE, Euranimi a soutenu que le Tribunal avait commis une erreur de droit en interprétant les conditions de recevabilité prévues à l'article 263, quatrième alinéa, du TFUE.

Conformément à cette disposition, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les actes de l’Union qui la concernent directement ou individuellement. Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, un recours en annulation est également recevable à condition que l'acte attaqué « ne comporte pas de mesures d’exécution » et qu’il concerne directement le requérant, sans qu'il soit nécessaire de démontrer que cet acte le concerne individuellement.

Dans son arrêt du 20 juin 2024, la Cour de justice a confirmé les appréciations du Tribunal et a rejeté le pourvoi. En premier lieu, elle a jugé qu’une association chargée de défendre les intérêts collectifs de certaines entreprises n'est pas apte à introduire un recours en annulation au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE que si elle peut faire valoir un intérêt propre ou si les entreprises qu’elle représente, ou certaines d’entre elles, ont qualité pour agir à titre individuel. La Cour a ajouté que bien que les règlements instituant des droits antidumping sur un produit s’appliquent généralement à tous les opérateurs économiques, ils peuvent toutefois concerner directement et individuellement certains d’entre eux. Cependant, la qualité d’importateur ne suffit pas, à elle seule, pour considérer qu’un importateur est individuellement concerné par un règlement instituant un droit antidumping. La Cour a conclu qu'Euranimi n'avait pas démontré que le règlement litigieux affectait individuellement ses membres.

En second lieu, la Cour de justice a examiné si le règlement litigieux comportait des « mesures d’exécution », au sens de l’article 263, quatrième alinéa, dernier membre de phrase, du TFUE. Elle a constaté que, conformément aux articles 101, paragraphe 1, et 102, paragraphes 1 et 2, du code des douanes, les autorités douanières compétentes déterminent le montant des droits à l’importation ou à l’exportation exigibles et en informent les débiteurs. Cette constatation suffit pour conclure que le règlement litigieux comporte des mesures d’exécution. Par conséquent, pour attaquer ce règlement, un requérant doit toujours démontrer que ce dernier le concerne individuellement.

Cet arrêt réaffirme les principes juridiques fondamentaux en matière de recevabilité des recours en annulation et confirme la validité des mesures antidumping adoptées par la Commission européenne. Il souligne également les difficultés pour les associations représentant des importateurs de prouver qu'elles sont individuellement concernées par des règlements instituant des droits antidumping, ce qui peut limiter leur capacité à contester des mesures qu'elles estiment porter préjudice pour leurs membres. Pour les importateurs et distributeurs de produits en acier inoxydable, cet arrêt signifie que les droits antidumping resteront en vigueur, en augmentant potentiellement leurs coûts d'importation et en nécessitant une adaptation continue de leurs stratégies commerciales.