Le conflit en Syrie a éclaté il y a de cela sept ans. Dès lors, l’Union européenne a suspendu sa coopération avec le gouvernement syrien concernant sa politique de voisinage. Des exemptions humanitaires ont néanmoins été établies et l’Union a développé une stratégie à plusieurs niveaux, pour répondre au mieux, aux différentes problématiques engendrées par le sévère conflit.
Au niveau national syrien, l’Union européenne a développé une stratégie, explicitée tant dans les conclusions du Conseil des affaires étrangères du 3 avril 2017 que dans la communication jointe de la Haute représentante et de la Commission du 14 mars 2017. Conformément à cette stratégie, l’Union européenne a des objectifs stratégiques en Syrie. Il s’agit tout d’abord de mettre un terme au conflit en instaurant une véritable transition politique négociée entre les parties, avec le soutien des acteurs tant internationaux que régionaux et plus spécifiquement avec le soutien de l’envoyé spécial des Nations Unies. Il s’agit aussi, en accord avec la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU et le Communiqué de Genève, de promouvoir une transition significative et inclusive en Syrie. La société civile syrienne sera accompagnée en vue de promouvoir en son sein des valeurs telles que la démocratie, les droits de l’homme et la liberté d’expression. L’objectif est également d’appuyer un processus de réconciliation nationale, d’une part en soutenant un accord de paix, et d’autre part, en luttant contre l’extrémisme violent. Une aide humanitaire efficace doit être apportée et il conviendra de promouvoir l’obligation de répondre des crimes de guerre afin de permettre une justice transitionnelle. Enfin, il s’agit de soutenir la résilience tant de la population que des institutions syriennes.
Cette stratégie européenne a été établie en vue d’accompagner le processus de paix onusien. Parallèlement à cela, l’Union européenne a soutenu, à hauteur de 4.6 millions d’euros, l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour ses missions spéciales sur le sol syrien, ses missions d’enquête ainsi que pour le mécanisme joint d’investigation (ONU-OIAC) suite à la résolution 2235 du Conseil de sécurité des Nations unies.
Au niveau régional, l’Union européenne a également développé une stratégie pour la Syrie, l’Irak et pour la menace que constitue Daesh, adoptée en mars 2015 et revue en mai 2016. D’une part, ce plan régional vise à apporter un soutien à la coalition internationale dans le combat contre Daech, en réduisant l’afflux de matériel et de combattants terroristes au profit de ce dernier. D’autre part, ce plan vise à prévenir la contagion régionale et à apporter une aide humanitaire aux pays de la région tels que le Liban, la Jordanie, la Turquie ou l’Irak, qui accueillent des millions de réfugiés syriens. Depuis le début du conflit en 2011, plus de 9 milliards d’euros ont été libérés par l’Union européenne et ses Etats membres pour venir en aide aux victimes tant sur le plan humanitaire qu’au niveau de l’assistance au développement. Pour la période de 2018 à 2020, c’est plus de 3,4 milliards qui ont été débloqués par l’Union européenne et la communauté internationale lors de la conférence qui s’est tenue à Bruxelles en avril 2017 pour l’aide à apporter pour l’avenir de la Syrie et des pays de la région. Concernant l’aide non-humanitaire, il s’agit de plus de 2.5 milliards d’euros débloqués par la Commission européenne sous différents programmes, comme par exemple l’instrument européen de voisinage, l’instrument contribuant à la stabilité et la paix, ou encore le fonds fiduciaire régional de l’UE en réponse à la crise syrienne (Fonds Madad, constitutif d’un mécanisme flexible réunissant les instruments financiers de l’UE et les contributions des Etats membres).
Au niveau européen, l’Union européenne a transféré sa délégation hors de Syrie (opérant maintenant depuis Beyrouth et Bruxelles) et a parallèlement pris des mesures restrictives contre le régime syrien et ses alliés jusqu’au 1er juin 2018. Ces mesures concernent, d’une part, des restrictions sur les exportations de certains équipements pouvant être utilisés pour une répression interne, un embargo pétrolier ou encore des restrictions sur certains investissements. D’autre part, ces mesures concernent plus de 300 personnes et entités soutenant le régime en place, contre lesquelles des gels de fonds et des interdictions de voyager ont été décidés.
Au vu des évènements tragiques persistant sur le sol syrien malgré la résolution 2401 du Conseil de sécurité des Nations unies, il est important que l’action de l’Union européenne se poursuive en vue d’un accord de paix. Il sera essentiel de redresser le pays et de consolider la paix. L’Union aura alors un rôle clé à jouer tant sur le plan humanitaire pour la population syrienne, que sur celui de la gouvernance. Permettre une justice transitionnelle, un retour des réfugiés, une réconciliation nationale et un nouveau gouvernement démocratique, tel sera alors le défi de la future Syrie.
Camille Limon, ‘Le conflit armé en Syrie et l’action de l’Union européenne’, actualité du jeudi 8 mars 2018, www.ceje.ch