L’Accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs Etats membres d’une part, et l’Albanie d’autre part (PDF), a été signé à Luxembourg le 12 juin 2006. Il se situe dans le cadre du processus de stabilisation et d’association, lancé à l’issue du sommet de Zagreb du 24 novembre 2000, qui implique la négociation et la conclusion de ce type d’Accords entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d’une part et les Etats d’Europe du Sud-est (Albanie, Bosnie-Herzegovine, Croatie, Serbie, Monténégro et ancienne République yougoslave de Macédoine). Ces pays sont des candidats potentiels à l’adhésion à l’Union européenne. Parmi ces Etats, l’Accord de stabilisation et d’association avec l’ancienne République yougoslave de Macédoine (JO L 84 du 20.3.2004, p. 3) est entré en vigueur le 1er avril 2004 et celui avec la Croatie (JO L 26 du 28.1.2005, p. 3) le 1er février 2005. Des négociations sont en cours avec la Bosnie-Herzegovine, alors qu’elles ont été suspendues avec la Serbie en raison du manque de coopération dans la recherche de certains criminels de guerre, notamment le général Mladic. Quant au Monténégro, des négociations séparées devraient s’ouvrir prochainement, à la suite de son indépendance, acceptée lors du référendum du 21 mai 2006 (voir Annexe II des conclusions de la Présidence relative au Conseil européen des 15-16 juin 2006, p. 25).
Fondé sur les articles 310 CE et 101 CEEA, l’Accord de stabilisation et d’association avec l’Albanie constitue un accord mixte, impliquant la participation conjointe de la Communauté européenne et de ses Etats membres ainsi que celle de la Communauté Euratom. Cette situation s’explique dans la mesure où son contenu dépasse les compétences propres de la Communauté européenne, notamment du fait de l’instauration d’un dialogue politique institutionnalisé. La mixité de l’Accord implique donc sa ratification par les Etats membres selon leur procédures constitutionnelles respectives. Afin de remédier aux inconvénients liés à la durée de la procédure de ratification, un Accord intérimaire (PDF) a été signé, le 12 juin 2006 également, par la Communauté européenne seule et l’Albanie. Fondé sur l’article 133 CE (politique commerciale commune), il reprend les dispositions commerciales de l’Accord de stabilisation et d’association relatives aux marchandises. Il s’appliquera après sa ratification par la Communauté européenne et l’Albanie et cessera ses effets lors de l’entrée en vigueur de l’Accord de stabilisation et d’association.
L’Accord de stabilisation et d’association avec l’Albanie est fondé sur plusieurs éléments essentiels : le respect des principes démocratiques et des droits de l’homme proclamés dans la déclaration universelle des droits de l’homme et définis dans l’Acte final d’Helsinki et la Charte de Paris pour une nouvelle Europe, le respect des principes du droit international et de l’Etat de droit, ainsi que les principes de l’économie de marché tels qu’ils sont exprimés dans le document de la conférence CSCE de Bonn sur la coopération économique (art. 2). La violation de ces éléments essentiels peut entraîner des mesures arrêtées conformément au droit international, pouvant aller jusqu’à la dénonciation de l’accord selon l’article 60 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. Au niveau opérationnel, l’Accord de stabilisation et d’association comporte quatre axes principaux : le dialogue politique (art. 8-11), la coopération régionale (12-15), le commerce (art. 16-77) et la coopération (art. 78-115).
Le dialogue politique se rapporte à l’ensemble des domaines couverts par l’Accord et tend notamment à la consolidation du rapprochement entre l’Union européenne et l’Albanie. Il se déroule en principe au sein du Conseil de stabilisation et d’association, mais peut également avoir lieu dans un cadre multilatéral.
Le volet relatif à la coopération régionale est spécifique au processus de stabilisation et d’association et s’explique par la période de guerre vécu dans cette région durant les années 1990. Aux termes de l’article 13 de l’Accord, l’Albanie engagera, après sa signature, des négociations en vue de la conclusion d’accords bilatéraux de coopération régionale avec les autres pays participant au processus de stabilisation et d’association qui ont déjà signé un tel accord avec la Communauté et ses Etats membres (à ce jour, la Croatie et l’ancienne République yougoslave de Macédoine). Ces accords doivent notamment concerner le dialogue politique, l’établissement d’une zone de libre échange entre les parties, la circulation des personnes et la coopération. Ce type d’obligations, imposées par la Communauté européenne à ses partenaires est nouveau dans le cadre des relations extérieures de cette dernière. En effet, elles ne se retrouvent pas dans les autres types de partenariat mis en place avec les différentes régions du monde, en particulier avec les Etats d’Amérique latine. Ces obligations peuvent a priori surprendre dans la mesure où elles constituent une ingérence importante dans la souveraineté de ces Etats. Elles peuvent toutefois se comprendre au regard du contexte historique et de l’objectif de stabilisation, impliquant une reprise de la coopération entre les pays concernés par le processus.
L’aspect commercial regroupe la libre circulation des marchandises, la circulation des travailleurs, l’établissement et la prestation de service. Sur le premier aspect, il s’agit de la mise en place d’une zone de libre échange avec la Communauté européenne sur une période de dix ans. La circulation des travailleurs porte sur l’interdiction de la discrimination en raison de la nationalité en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement. Elle porte également sur les droits d’accès à une activité salariée des membres de la famille du travailleur légalement employé sur le territoire d’une autre partie à l’accord. Par contre, il n’existe pas de véritable libre circulation des travailleurs, comme cela est d’ailleurs le cas dans les Accords "européens".
L’établissement ne concerne que les sociétés et non les personnes physiques. Il implique un traitement non moins favorable que celui accordé aux entreprises nationales ou à celles d’Etats tiers lorsque ce traitement est plus favorable. La prestation de service fait l’objet d’un processus de libéralisation, les parties s’engageant à prendre les mesures nécessaires en ce sens. Il ne s’agit donc pas d’une libéralisation des services au sens de l’article V du GATS.
L’aspect relatif à la coopération est très large et vise principalement à promouvoir le développement et la croissance de l’Albanie. La coopération couvre des domaines très variés tels que la justice et les affaires intérieures, la politique économique, le domaine statistique, la coopération industrielle, le tourisme, la fiscalité, l’éducation et la formation, la société de l’information, l’énergie ainsi que l’environnement.
Pour en savoir plus :
Processus de stabilisation et d’association
Reproduction autorisée avec indication : Fabien Mangilli, "Signature de l’Accord de stabilisation et d’association avec l’Albanie, le 12 juin 2006", www.ceje.ch, actualité du 22 juin 2006.