Le 1er décembre 2022, le Conseil a adopté cinq mesures d’assistance dans le cadre de la Facilité européenne pour la paix (« FEP ») en faveur des forces armées de la Bosnie-Herzégovine (10 millions d’euros), des forces de défense géorgiennes (20 millions d’euros), des forces armées libanaises (6 millions d’euros), des forces armées de la Mauritanie (12 millions d’euros) et des forces de défense rwandaises (20 millions d’euros) dans la province de Cabo Delgado au Mozambique. Cinq jours après l’adoption de ces mesures d’assistance visant la fourniture d’équipements militaires, d’infrastructures et d’assistance technique, l’Union européenne (« UE ») et la Norvège ont conclu un accord administratif pour permettre à ce pays tiers de fournir, en vertu de l’article 30 de la décision (PESC) 2021/509, une contribution volontaire d’approximativement 14,5 millions d’euros en faveur de la mission EUAM Ukraine. Pour la première fois depuis la création de la FEP, un État tiers a décidé de contribuer de manière volontaire aux mesures d’assistance en faveur d’un pays faisant l’objet d’une agression armée.
La FEP est un fonds créé par le Conseil en mars 2021 pour la prévention des conflits, la consolidation de la paix et le renforcement de la sécurité internationale qui est déjà actif dans plusieurs régions du monde (Mozambique, Géorgie, Moldavie, Ukraine, Mali, Somalie, Balkans et Nigéria). Cet instrument relève de la Politique étrangère et de sécurité commune (« PESC ») et remplace les anciens instruments financiers dans le domaine de la défense : le mécanisme ATHENA et la facilité de soutien à la paix pour l’Afrique. Ayant des implications militaires, la Facilité est financée par les contributions des Etats membres sur la base de leur revenu national brut en dehors du budget pluriannuel de l’UE et bénéficie pour la période 2021-2027 d’un plafond financier de 5,692 milliards d’euros. Ce plafond est réparti en deux piliers : le pilier « Opérations » visant le financement des missions et des opérations de politique de sécurité et de défense commune (« PSDC ») en vertu de l’article 42, paragraphe 4 et l’article 43, paragraphe 2, TUE (actuellement, sept opérations militaires de l’UE sont financées par la FEP : EUFOR ALTHEA, EUNAVFOR ATALANTA, EUTM Somalie, EUTM Mali, EUTM RCA, EUNAVFOR MED IRINI, EUTM Mozambique), et le pilier « Mesures d’assistance » en faveur de tiers (États, organisations régionales ou internationales) en vertu des articles 28 et 30 TUE. Le comité de la Facilité, composé de représentants de chaque État membre et présidé par un représentant de la présidence du Conseil, dirige les activités de la FEP.
L’élargissement de la portée géographique des mesures d’assistance FEP ainsi que la participation d’un État tiers à ce mécanisme représentent une évolution substantielle en matière d’augmentation des capacités de défense de l’UE et de ses États dans le cadre de la PSDC. Par ces efforts, l’UE et, depuis le 6 décembre, la Norvège en tant que tierce partie, se positionnent sur la scène internationale en réaffirmant la notion de neutralité dans son acception post-1945 - aussi codifiée dans la Charte ONU - dans un esprit de coopération internationale contre l’agresseur. Cette évolution soulève des enjeux intéressants tant sur le plan interne que sur le plan extérieur de l’UE : au niveau interne, concernant la participation du Parlement européen dans la mise en œuvre et l’examen de la FEP ; au niveau international, concernant un possible engagement de la responsabilité indirecte de l’Union et de ses États membres (ainsi que de la Norvège en ce qui concerne la situation en Ukraine) liée aux risques de détournement et d’abus d’équipement fourni. Il n’en demeure pas moins que le caractère de ces avancées est considérable, spécialement dans un domaine sensible comme celui de la défense.
Sara Notario, Facilité européenne pour la paix : élargissement de la portée géographique et première contribution volontaire d’un pays tiers, actualité du CEJE n° 31/2022, 23 décembre 2022, disponible sur www.ceje.ch