La responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l’homme et des normes environnementales fait l’objet de l’actualité en Europe. La Suisse a rejeté l’initiative populaire « Entreprises responsables- Pour protéger l’être humain et l’environnement » le 29 novembre 2020. Ce sera le contre-projet qui constituera les règles applicables en Suisse en la matière.
Qu’en est-il de la responsabilité des entreprises en matière de droits de l’homme et de développement durable dans l’Union européenne ? Celle-ci considère l'entrepreneuriat responsable indispensable pour le développement durable, qui est l’un des objectifs de l’Union (article 3, paragraphe 3, du traité sur l’UE).
Dans le but de promouvoir l’entrepreneuriat responsable, l’UE a adopté des actes dans différents domaines de son action intérieure et extérieure, par exemple, la directive 2014/95 concernant la publication d'informations non financières et d'informations relatives à la diversité par certaines grandes entreprises et certains groupes et le règlement 995/2010 établissant les obligations des opérateurs qui mettent du bois et des produits dérivés sur le marché de l’Union. Ces actes, parmi d’autres, contribuent à promouvoir la mise en œuvre au niveau de l’Union des principes directeurs des Nations unies relatifs aux entreprises et aux droits de l'hommes, des principes directeurs de l’Organisation de coopération et développement économique (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales et de la déclaration de principes tripartite de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur les entreprises multinationales et la politique sociale. Ces principes, qui ne sont pas juridiquement contraignants, sont adressés à toutes les entreprises dans tous les pays, indépendamment de leur taille, secteur, régime de propriété et structure. Ils exigent des entreprises de respecter les droits de l’homme dans le cadre de leurs activités commerciales. En 2011, l’Union européenne a exprimé sa volonté d’adhérer aux principes des Nations unies et a appelé ses États membres à mettre en œuvre ces principes, ainsi que les principes de l’OCDE et de l’OIT. À nos jours, quinze États membres ont adopté leur plan d'action national sur les entreprises et les droits de l’homme, qui diffèrent largement d’un État membre à un autre en termes de mise en œuvre et d’engagements.
Malgré l’action entreprise par l’Union européenne, la mise en œuvre des principes susmentionnés reste incomplète. L’adoption de normes de diligence raisonnable en matière de droits pour les opérations commerciales, les chaînes d'approvisionnement et les relations d'affaires, l'amélioration de l'accès aux recours en cas d’abus et le renforcement de la protection des défenseurs des droits de l'homme devraient être prioritaires. Dans cette perspective, la Commission européenne a annoncé, le 20 mai 2020, son intention de présenter en 2021 une nouvelle initiative sur la gouvernance d'entreprise durable, qui portera notamment sur les droits de l'homme, le devoir de prudence en matière d'environnement et la diligence raisonnable dans les chaînes d'approvisionnement et de valeur économiques.
Dans ses conclusions sur les droits de l'homme et le travail décent dans les chaînes d'approvisionnement mondiales du 1 décembre 2020, le Conseil a constaté l’aggravation de la situation, déjà précaire, de certains segments de la main-d'œuvre dans les chaînes d'approvisionnement mondiales en raison de la crise du Covid-19. Il a demandé à la Commission européenne de lancer, d'ici à 2021, l’initiative sur la gouvernance d'entreprise durable et de présenter une proposition relative à un cadre juridique de l'UE dans ce domaine, comprenant des obligations pour les entreprises en matière de diligence raisonnable tout au long des chaînes d'approvisionnement mondiales. Le Conseil a aussi invité les États membres à redoubler d'efforts pour mettre en œuvre les principes directeurs des Nations unies. Sur la scène internationale, le Conseil a invité les États membres à faire partie des initiatives adoptées par des organisations internationales pour supprimer le travail des enfants et le travail forcé (l’ « Alliance 8.7 » créée par les Nations unies) et les décès, les accidents et les maladies liés au travail dans les secteurs qui opèrent dans les chaînes d'approvisionnement mondiales (le « Fonds Vision Zéro », créée par l’OIT). Par ailleurs, le Conseil a appelé la Commission à insérer des dispositions relatives à la gestion responsable de la chaîne d'approvisionnement dans les accords commerciaux conclus par l’Union avec des pays tiers et à renforcer les clauses relatives aux droits de l’homme dans ceux-ci.
Le thème des obligations des entreprises en matière de respect des droits de l’homme et des normes environnementales est clairement au cœur de l’actualité politique dans l’Union européenne.
Maddalen MARTIN, Quid de l’entrepreneuriat responsable en Europe ? actualité du CEJE nº 43/2020, disponible sur www.ceje.ch