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La refonte de la directive relative à l’utilisation confinée des micro-organismes génétiquement modifiés

Anne Monpion , 9 juillet 2009

La directive 2009/41 du Parlement européen et du Conseil du 6 mai 2009, entrée en vigueur le 26 mai, constitue une refonte de la directive 90/219 du 23 avril 1990 relative à l’utilisation confinée des micro-organismes génétiquement modifiés (MGM). La directive 90/219 avait pour objectif de mettre en œuvre le principe de l’action préventive en établissant des mesures communes régissant l’utilisation confinée des MGM afin de protéger la santé humaine et l’environnement.

Elle était donc fondée sur l’article 130 S du traité CE, c’est-à-dire la base juridique environnementale instituée par l’Acte unique européen. A l’époque, seul le Conseil était compétent pour adopter un acte sur ce fondement. Il a fallu attendre le traité d’Amsterdam pour que la procédure de codécision s’applique en la matière. C’est la raison pour laquelle la directive 2009/41 est fondée sur l’article 175 § 1 (qui remplace l’article 130 S) et a été adoptée par le Conseil et le Parlement européen. La refonte de ce dispositif est devenue nécessaire, dans un souci de clarté, en raison des modifications substantielles dont il a fait l’objet à plusieurs reprises (considérant 1). Cette nouvelle directive n’impose donc pas vraiment de nouvelles obligations aux Etats membres, qui ont déjà dû transposer la plupart des modifications dans leur ordre juridique interne. Le considérant 28 indique que « les nouveaux éléments introduits dans la présente directive ne concernent que les procédures de comité. Ils ne nécessitent donc pas de transposition par les Etats membres ». L’article 21 précise en outre que la directive 90/219, telle que modifiée par les actes énumérés à l’annexe VI, partie A, est abrogée, sans préjudice des obligations des Etats membres en ce qui concerne les délais de transposition en droit national de ces actes.

Le dispositif, tel que détaillé dans la directive 2009/41, est donc déjà appliqué par les Etats membres. La directive entend par « utilisation confinée », toute opération dans laquelle des micro-organismes sont génétiquement modifiés ou dans laquelle des MGM sont cultivés, stockés, transportés, détruits, éliminés ou utilisés de toute autre manière et pour laquelle des mesures de confinement spécifiques sont prises pour limiter le contact de ces micro-organismes avec l’ensemble de la population et l’environnement ainsi que pour assurer à ces derniers un niveau élevé de sécurité (article 2). Un MGM est un micro-organisme dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne se produit pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle (article 2). Le dispositif repose sur une évaluation, par l’utilisateur, des utilisations confinées, « du point de vue des risques qu’elles peuvent présenter pour la santé humaine et l’environnement » (article 4). L’évaluation aboutit au classement définitif des utilisations confinées en quatre classes, ce qui entraîne la fixation de niveaux de confinement (article 4 § 3). La classe 1 comprend les opérations pour lesquelles le risque est nul ou négligeable, la classe 2 contient celles présentant un risque faible, la classe 3 correspond aux opérations présentant un risque modéré et enfin la classe 4 regroupe les opérations à risque élevé.

L’utilisateur applique les principes généraux et les mesures de confinement et autres mesures de protection appropriées qui correspondent à la classe d’utilisation confinée, afin de maintenir au niveau le plus faible qui soit raisonnablement possible l’exposition du lieu de travail et de l’environnement aux MGM, et ce afin de garantir un haut niveau de sécurité (article 5 § 1). Les Etats membres doivent procéder à la désignation d’autorités compétentes qui examinent si les notifications répondent aux prescriptions de la directive, si les informations données sont exactes et complètes, si l’évaluation et la classe des utilisations confinées sont correctes (article 10). Les notifications correspondent, avant d’entreprendre pour la première fois l’utilisation confinée d’un MGM dans une installation particulière, à la transmission par l’utilisateur à l’autorité compétente d’un certain nombre d’informations, dont la teneur varie en fonction de la classe d’utilisation (articles 6 à 9). A titre indicatif, l’utilisateur, dans le cadre d’une opération évaluée en classe 1, doit fournir, entre autres, son nom ou celui des utilisateurs, y compris des responsables du contrôle et de la sécurité, des informations sur la formation et la qualification des personnes responsables du contrôle et de la sécurité, l’adresse et la description générale du site, une description de la nature du travail qui sera entrepris. Dans le cadre d’une utilisation confinée de classe 4, l’utilisateur doit être plus précis puisqu’il doit indiquer à l’autorité compétente, en plus des informations énumérées ci-dessus : la nature et les caractéristiques du ou des MGM, les volumes de culture à utiliser, une description des mesures de confinement et autres mesures de protection à appliquer, y compris des informations sur la gestion des déchets, notamment le type et la forme des déchets qui seront produits, leur traitement, leur forme et leur destination finales, l’objectif de l’utilisation confinée, y compris les résultats escomptés, une description des parties de l’installation, des informations concernant la prévention des accidents et les plans d’urgence, le cas échéant, les risques spécifiques inhérents au site de l’installation, les mesures préventives appliquées, telles que l’équipement de sécurité, les systèmes d’alarme et les méthodes de confinement, les procédures et les plans pour vérifier l’efficacité permanente des mesures de confinement, une description des informations fournies aux travailleurs.

Les principes de la Convention sur l’accès à l’information, la participation du public et l’accès à la justice en matière d’environnement (convention d’Århus de 1998) sont mis en œuvre par cette directive puisque l’article 12 dispose que s’il l’estime approprié, tout État membre peut prévoir que le public doit être consulté sur des aspects de l’utilisation confinée envisagée. Avant le début de l’utilisation confinée, les autorités compétentes doivent s’assurer qu’un plan d’urgence est établi afin de réagir efficacement en cas d’accident et que les personnes susceptibles d’être affectées par un accident sont informées sur tous les aspects se rapportant à leur sécurité (article 13). En cas d’accident, l’utilisateur doit immédiatement en informer l’autorité compétente et communiquer toutes les informations nécessaires afin d’évaluer ses répercussions et pouvoir adopter des mesures appropriées (article 14). De plus, l’État membre doit en informer la Commission ainsi que tout État membre pouvant être affecté (article 15, paragraphe 1). La Commission crée un registre des accidents survenus qui contient une analyse des causes, l’expérience acquise et les mesures prises pour la prévention d’accidents semblables (article 15, paragraphe 2). Afin de permettre la surveillance, dans l’ensemble de la Communauté de l’utilisation confinée de MGM, les États membres doivent envoyer à la Commission, à la fin de chaque année, un rapport de synthèse sur les utilisations confinées des classes 3 et 4 notifiées au cours de l’année écoulée, y compris la description, l’objectif et les risques de l’utilisation (article 17, paragraphe 1).

Cette refonte introduit néanmoins de nouvelles modifications qui concernent essentiellement le pouvoir d’exécution de la Commission. En effet, en vertu de l’article 202 du traité CE, le Conseil délègue à la Commission le pouvoir d’exécuter les actes qu’il établit. Celle-ci est en effet habilitée à arrêter les modifications nécessaires pour adapter la directive au progrès technique. Ces mesures ayant une portée générale et ayant pour objet de modifier des éléments non essentiels de la directive, elles doivent être arrêtées conformément à la procédure de réglementation avec contrôle prévue à l’article 5 bis de la décision 1999/468 du Conseil du 28 juin 1999 fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission, telle que modifiée par la décision 2006/512 du Conseil du 17 juillet 2006 (articles 19 et 20). Le Parlement européen contrôlera donc, au même titre que le Conseil, l’exercice par la Commission de son pouvoir d’exécution dans ce domaine sensible. Cette directive ne réglemente donc pas la dissémination des OGM, c’est-à-dire leur mise sur le marché et leur mise en culture, plus médiatisées. Elle intervient en amont, au stade expérimental, et vise à éviter la survenance d’accidents lors de manipulations dont les risques sont difficilement identifiables. Une fois les expérimentations terminées en milieu confiné, l’utilisateur, qui estime que les résultats méritent d’être exploités, sera soumis au champ de la directive 2001/18 du Parlement européen et du Conseil, du 12 mars 2001, relative à la dissémination volontaire d’organismes génétiquement modifiés dans l’environnement et abrogeant le directive 90/220 du Conseil, dont l’objet est de réglementer la mise sur le marché.

La directive 2009/41 n’a donc pas pour objectif de réviser le dispositif de prévention des risques en matière d’utilisation confinée de MGM, mais de clarifier le droit existant dans ce domaine, en vue d’une meilleure efficacité. Dans ce domaine pétri d’incertitudes scientifiques et donc en perpétuelle mutation, cette initiative de refonte ne peut qu’être saluée.


Reproduction autorisée avec indication : Anne Monpion, "La refonte de la directive relative à l’utilisation confinée des micro-organismes génétiquement modifiés", www.ceje.ch, actualité du 9 juillet 2009.